lundi 8 octobre 2012

Juliette, le patchouli et notre adolescence

Juliette elle devait pas faire beaucoup plus que 130 cm, quand je l'ai rencontrée. Elle avait les cheveux rouges, puis bleus, puis verts délavés. Un jour, l'école nous a emmené à Amiens et Senlis, et depuis on ne s'est jamais vraiment quittées. Dans ma tête, "Amiens et Senlis", ça a la même couleur que Juliette. Puis, Juliette m'a présentée à tous ses amis et j'étais très impressionnée. Ils étaient grands, ils étaient beaux et ils étaient fous. Tellement que moi je me sentais infiniment petite à côté d'eux. Juliette disait "ce sont les Daeps et toi tu es une daepsette" et moi je disais toujours "non non, moi je suis pas une daepsette... c'est toi la daepsette". Juliette et moi on jouait à "Juliette habille Camille" et les gens trouvaient que je m'habillais bien. J'ai mis des robes mauves, des jupes fushia, des bandeaux dans mes cheveux, des t-shirts superposés. Juliette elle savait comment me rendre belle. Puis, Juliette a voulu que je fasse du théâtre avec elle et avec Anne Gérard, alors j'ai fait du théâtre. Juliette a voulu que je vienne à Jérusalem avec elle, alors j'y suis allée... Avec Juliette, j'ai vécu toutes mes premières fois. Mon premier amour, mon premier baiser, ma Première Fois, mon Amour longue distance, Le Grand Amour, la Maternité... Avec Juliette, il y a eu Avignon aussi, quand j'étais toute perdue et toute malmenée par ce garçon dont j'étais folle et qui avait une bien drôle de façon de me dire que c'était réciproque. Juliette elle était là à ramasser mes larmes à la petite cuillère. Parce que Juliette, elle sait écouter simplement, sans juger. Même si Juliette elle aime bien trouver des solutions et que parfois on a envie de lui dire que ce n'est pas la peine. C'est parce que Juliette elle aime bien tout organiser pour tout le monde et tout le temps, que tout se passe bien. Quand elle joue la première de son spectacle à Londres, moi je suis dans les gradins, tout en haut. Juliette est tellement petite sur la scène, de là où je suis, que je doute un instant que ce soit bien elle. Et puis il y a la voix de Juliette et je me dis qu'il est loin le temps où on chantait "aaaah qu'on est bien dans un bon bain" pendant qu'elle jouait du piano.
Aujourd'hui, quand je passe rue Antoine Dansaert, je pense à ce vieil appartement bruxellois et à la chambre de Juliette, tout au fond, juste après le dressing, et ses rideaux en patchwork. La fresque dans la salle de bain, les mosaïques, les carreaux teintés, l'odeur de patchouli et d'herbe et c'est toute mon adolescence qui me remonte aux narines... Ma grosse veste brune, mes chemises trop grandes, mes baskets masculines, Ian, Tom, les Daeps, Pierre, Noam et tous les autres. Et puis Ludo qui arrive pour fêter les 18 ans de Juliette et son entrée dans la vie d'adulte. Ludo il lui change la vie, qui la rend encore plus belle, plus femme, plus sûre d'elle et ça se voit dans ses yeux. De l'extérieur, c'est Juliette qui emmène Ludo dans son monde, le Québec, tout ça. Mais moi, je sais que Ludo il a mis beaucoup de son monde dans celui de Juliette... Les arbres, la nature, l'odeur des cascades... Et aux Moissons les voilà qui accueillent leurs amis avec une tasse de thé, puis à la roulotte, puis à Saint Gilles, puis à Lauzelle, puis... Juliette et Ludo sont nomades mais ils sont partout chez eux et chacun à leur façon font des lieux qu'ils habitent un endroit où ils fait bon être. Et depuis quelques années ce sont moins les histoires de garçons qu'on se raconte que les histoires de nos enfants.
Juliette elle veut toujours le beurre, l'argent du beurre et le sourire du crémier. Et quand Juliette veut... souvent, Juliette obtient et nous, les autres, on se demande comment elle fait. Mais quand elle n'y arrive pas, que le crémier est de mauvaise humeur ou que le beurre est un peu ranci, Juliette est triste et se demande pourquoi le monde est si injuste. Juliette chante et danse au milieu de tout le monde et quand elle n'a plus le coeur à ça, nous, les autres, on s'inquiète et on se demande pourquoi Juliette ne danse plus.
Juliette, c'est un peu l'Amie avec un grand A. L'Amie d'hier, de demain, de toujours et pour toujours. Parce que ça ne peut pas être autrement, tout simplement.

Et puis Juliette elle comme ça, aussi :

Et si je parle de Juliette aujourd'hui, c'est un peu de mon adolescence que je parle et de ce temps béni où nos préoccupations étaient aussi légères qu'un regard de velours et les "tu crois qu'il m'aime bien ?" C'est un peu de nostalgie qui coule... Pourtant, parce que nous avons vécu cette vie là ensemble, il me semble qu'il y a aura toujours un peu d'insouciance en nous. Il y aura toujours un peu de légèreté tant qu'on pourra s'embarquer l'une et l'autre dans nos coups de folie respectifs. Il y aura toujours dans le regard que Juliette porte sur moi, le rappel de l'adolescente que j'ai été... Et c'est aussi ça qui rend cette amitié si nécessaire...

5 commentaires:

  1. Ce que je suis contente de lire ça! :-)

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  2. Snourf moi ça me fous la larme à l'oeil parce que j'ai aussi une amie comme ça (hein Stephouille).
    Mais c'est tellement touchant, sincère et tout et tout que j'aurai pas pu faire plus belle déclaration :)
    Bref tu nous as bien vendu Juliette

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  3. Cette fois-ci je mets ZAZOU ^^8 octobre 2012 à 18:14

    Ah je me souviens de ce garçon d'Avignon :) ... Je ne sais plus comment s'appelait son (ton) amie qui était revenue après sur Bruxelles ? Je correspondais avec elle mais je ne me souviens plus de son nom :/ !!

    Et l'appartement rue Dansaert !!! Un lieu qui m'a marqué aussi ... Mon premier baiser avec Tom ^^ et ces longues et douces accolades que l'on se faisait tous ensemble, tout le temps :) T'en souviens-tu ? :)

    C'est peut-être bête à le dire (tout haut lol) mais en lisant ton post, je pensais à Juliette qui se couchait sur ton lit dans ta chambre à Uccle ... Comme si "elle était partout chez elle" -- cette image de vous est restée dans ma mémoire comme deux soeurs, qui mangent des glaces chez Capoue après l'école ...

    Je suis contente d'avoir fait partie de ton adolescence Camille, c'était une belle période que l'époque du théâtre avec Anne Gérard :)

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  4. On mangeait des glaces chez ZIZI après l'école, non didoum, Zazou !

    Et, oui, définitivement une belle période qui valait bien un billet ^^

    Il y aurait aussi des choses à dire sur les soirées dans ton appartement à St Josse ;-)

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  5. ah ouiiiii ZIZI ! hahaha ! Que c'était bon les glaces de chez ZIZI ^^

    Peut-être un jour lirai-je un article des fameuses soirées à Madou (qui ne sont pas, dans mon esprit, de très bons souvenirs par contre :$ ...)

    Et Camille, je maintiens que tu dois un jour écrire un bouquin (ou serait-ce déjà fait?) tu as un vrai DON pour l'écriture, et je veux bien être ta ... mmmh... ton agent littéraire ? ^^ On va être RICHES ensemble hahaha :p

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