Pourquoi les étudiants n'ont pas d'enfant.

Tout à l'heure j'ai mis Noé au lit avec l'espoir qu'il dorme jusque demain matin. Je me suis couchée près de lui, prétextant à une sieste en commun, et quand je me suis réveillée une heure plus tard j'ai essayé de sortir du lit en l'y laissant. Ca n'a pas marché.

J'en pleurerais presque, tellement j'avais besoin d'avoir cette soirée pour moi. J'en pleurerais presque tellement je n'ai pas envie de lui parler, de m'occuper de lui, d'être avec lui, de devoir l'endormir, mettre de l'énergie à l'écouter et lui répondre.

J'en pleurerais presque de me rendre compte que ça m'est pénible de passer du temps avec lui.

J'en pleurerais presque tellement je suis méchante et agressive. Tellement c'est dur de me contrôler. Tellement je me rends compte que je ne voudrais avoir rien d'autre à penser que ce foutu mémoire.

Ce foutu mémoire... Dans 19 jours je dois le rendre, puis faire un rapport de stage, puis étudier un examen, puis préparer une défense. Puis seulement, dans un mois et demi, j'aurai l'esprit libre.
Et en attendant je voudrais tellement pouvoir ne pas être une mère, ne rien avoir à faire d'autre que me lever, travailler, manger, dormir.

Mon fils, mon petit bout d'homme, excuse-moi. Je sais que déjà tu sens que je ne suis pas très disponible. Physiquement, mentalement... Je ne suis pas vraiment avec toi. Je sais que déjà tu as l'impression que je voudrais que tu ne sois pas là, je voudrais que tu puisses te passer de moi. Je sais que tu te demandes déjà quand est-ce que je vais de nouveau t'aimer comme avant. Je suis désolée de ne pas pouvoir te dire que c'est pour bientôt. J'ai l'impression de ne plus respirer et je voudrais que le 25 juin soit déjà demain. Non, je voudrais que ce soit maintenant. Hier. Je voudrais ne pas être étudiante. Je voudrais ne rien avoir d'autre que toi. Je voudrais pouvoir gérer tout ça beaucoup mieux. J'aimerais me sentir moins seule avec cette charge de travail. J'aimerais qu'un mémoire de fin d'étude ça ne soit pas si prenant. Je voudrais avoir la sensation de mieux y arriver et que tu ne payes pas le prix de ma concentration.

Je me raccroche à l'idée que dans quelques mois tout ça sera loin. Je me raccroche à l'idée que dans quelques années nous aurons tous les deux oublié que c'était dur et que j'en  pleurais.