samedi 21 juillet 2012

Lectures estivales - 3

Bienvenue au Front, c'est le titre du livre que j'ai posé hier soir après 309 pages d'agacements et exaspérations en tout genre. Non que le livre soit mauvais, mais plutôt que son propos soit de relater 9 mois passés par l'auteure dans les arcanes militantes du FN français.

Claire Checcaglini, l'auteure en question, a en effet infiltré le Front en s'affiliant d'abord, puis en militant à raison de plusieurs RDV hebdomadaires. Ce faisant elle a rencontré les militants lambda, mais aussi, à force de bons et loyaux services, elle réussit à grimper dans la hiérarchie et à côtoyer les cadres du parti nauséabond.

Le postulat de départ : le Front a-t-il vraiment changé de peau ? Avec l'élection Marine Le Pen, certains aimeraient faire croire que ce parti extrémiste n'est plus celui qu'il était, raciste et antisémite (on se souvient que pour le père Le Pen, les chambres à gaz n'étaient rien d'autre qu'un détail de l'histoire...). Le Front National, depuis un peu plus d'un an s’ingénie effectivement à modifier son image de marque et à axer son discours sur la préférence nationale, la préservation de l'identité nationale elle aussi et, surtout, sur un volet beaucoup plus social. Non pas que ces thèmes soient franchement plus reluisant mais l'idée est toutefois d'éviter de parler d'immigration et de se faire taxer de racisme.

Le Front a-t-il vraiment changé ? telle est donc la question que Claire Checcaglini tente de résoudre en infiltrant le Front, sachant que celui-ci formate son discours à l'endroit des journalistes et qu'elle n'obtiendra aucune réponse valable en se présentant frontalement (huhu) à celui-ci en qualité de journaliste. Comme elle l'écrit "puisque le front avance caché, il me faudra avancer cachée aussi."

Il ne faut pas attendre 3 pages avant d'avoir la réponse : non. Le Front n'a pas changé (et d'entonner le petit refrain de Julio Iglesias...) Les 306 qui suivent ne démentent pas. Les instances du parti sont pétries de racistes de tous bords, d'antisémites, de négationnistes, de cons et de fous furieux prêts à prendre les armes pour défendre leur idéal national. Qu'ils soient simples militants, salariés du parti, candidats ou élus à divers niveaux, tous tiennent un double discours. Il y a ce que l'on dit devant les médias et ce que l'on dit "entre soi". Et les têtes dirigeantes du parti ne se lassent pas de répéter encore et encore de quelles façons il est préférable de se tenir et quel discours on peut ou non prononcer.

A savoir que ne sont "éjectés" du parti que ceux qui à un moment ou à un autre seront montré du doigt sur la place publique. En dehors de ça, le secrétaire départemental du 92 peut à son aise poster sur son blog (public, donc) un article intitulé "Contre l'islamisation, la méthode forte" dans lequel il théorise très sereinement sur la future guerre civile qui ne peut qu'exploser entre "français de souche" et immigrés musulmans, ces premiers étant nécessairement amenés à prendre les armes contre leurs "envahisseurs". Si ça c'est de la modération... Sur le même blog, le même secrétaire départementale poste sans frémir des interviews de l'ex leader du Ku Klux Klan dont on devine sans peine le contenu. Évidemment, le tout sans que son parti n'en prenne ombrage. Tout juste recevra-t-il un blâme après que la presse s'en soit tenu informé.

Ce qui frappe par ailleurs, c'est la prégnance de la haine, de la violence et de l'obscurantisme au sein du parti, à tous les niveaux. Non, le FN n'est pas un parti respectable. Ni maintenant, ni jamais. On le savait, évidemment. Pour certains, c'est enfoncer une porte ouverte... Mais peut être pas pour tout le monde. A force d'entendre que "la Marine elle est quand même moins pire que son père" on finirait presque par le croire.


CHECCAGLINI (Claire), Bienvenue au Front : journal d'une infiltrée, s.l., Jacob-Duvernet, 2012, 309 p.

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