Quand j'étais môme, l'une de mes plus grandes préoccupations était de me conformer à ce que l'on attendait de moi. Je n'étais pas fort sûre de moi, donc je me conformais à ce que je considérais comme la norme. J'essayais de ne pas dépasser du cadre. Pourtant, le but n'était pas de passer inaperçue. Je voulais me faire remarquer par ma très grande capacité à être normale. En gros, je voulais être plus normale que normale, tellement normale que ça en devenait remarquable. J'étais môme, je ne savais pas que cette quête était vaine et le mot "paradoxe" ne signifiait rien pour moi.
Pour être dans la norme, j'observais tout autour de moi ce qui se faisait. Je n'osais rien entreprendre, de peur de ne pas le faire assez bien. Je ne proposais rien, de peur de ne pas répondre aux attentes. Je me cantonnais au rôle de suiveuse, prenant de cette façon, le moins de risque possible de ne pas être dans le ton. Et j'étais triste, complexée, frustrée de ne jamais être que la deuxième, la suiveuse, l'inintéressante, l'intalentueuse.
Bref, j'étais influençable.
Je n'avais pas envie de transmettre toutes mes tares à Noé, pourtant je dois bien admettre qu'en ce qui concerne celle-ci, je n'ai pas réussi à la protéger. Il est manque de confiance en lui et il préfère suivre qu'inventer.
Je voudrais lui dire de se faire plus confiance, lui dire qu'il n'a rien à envier à personne, qu'il n'est ni plus ni moins capable qu'un autre. Je sais pourtant que c'est plus profond que ça.
L'enfant que l'on a été parasite souvent le parent que l'on voudrait être.
Je pourrait lui dire aussi que ce n'est pas toujours mal d'être influençable. Si je ne l'avais pas été, si j'avais été plus persuadée de mes capacités, je ne me serais pas attachée à des gens formidables, peut être. Peut être que je n'aurais pas suivi Juliette en Israël, au Québec. Peut être que je ne l'aurais pas suivie dans ses délires. Peut être que je n'aurais pas rencontré Nathan. Peut être qu'il ne m'aurait pas changée comme il m'a changée. Peut être que je serais restée ignorante de tout et fière de l'être.
Peut être que de savoir suivre, ça peut être une belle qualité. Gilles disait "je suis un suiveur enthousiaste". C'est beau aussi, de s'effacer pour mieux suivre le mouvement.
Pourtant, mon fils, je voudrais que tu saches qu'il y a un monde de possibilités qui s'offre à toi. Je voudrais que les complexes ne pourrissent pas ta vie. Je voudrais que tu sois conscient de toutes tes qualités. Je voudrais que tu te sentes bien et à ta place.
Et je ne sais pas comment faire. Et je me sens coupable de ne pas avoir su te faire confiance, petit, et de voir aujourd'hui qu'en retour tu ne te fais pas confiance non plus.
Parfois, je me demande s'il est obligatoire que nous, parents, soyons voués à malmener le cœur de nos enfants.
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