Lorsqu'il avait trois semaines, Noé a commencé à développer quelques plaques sur le visages. Vincent était inquiet alors on a été chez notre pédiatre qui nous a dit "non non non, tout va bien madame la Marquise". Deux jours plus tard, les plaques étaient toujours là, plus rouges, plus grandes, plus impressionnantes. Une nouvelle visite chez le pédiatre nous renvoya chez nous avec une ordonnance et quelques conseils. Deux jours après, Noé n'était plus qu'une immense plaque purulente, entre le jaune moutarde et le rouge violacé. Il suintait de partout, était tout boursouflé et ne savait plus ouvrir les yeux tellement il était gonflé. Cette fois le pédiatre nous renvoya chez nous avec un : "haaaan mais qu'est-ce que c'est que ça !" (je n'exagère pas)
Une petite visite chez un spécialiste s'imposait (ainsi qu'un changement de pédiatre... pour finalement atterrir chez une généraliste homéopathe parfaite). C'est alors que le verdict tomba : Il fallait supprimer de l'alimentation de Noé tout ce qui s'apparentait à du lait d'animal ainsi que les oeufs. Et comme c'était moi, son alimentation, c'est moi qui eu l'immense privilège de me priver de tout ce que j'aime pour que lui ait le meilleur de ce que j'avais à lui offrir.
Quelques mois et prises de sang plus tard (et un changement de spécialiste) nous avons aussi du retirer de son alimentation le gluten, les fruits crus, le soja, les amandes, les arachides et d'autres bricoles. Là j'ai dit "stop, j'ai donné, démerde-toi tout seul mon grand !" Sans honte, ni regret.
Sauf que mon coeur de gourmande était triste de se dire qu'il ne pourrait jamais goûter aux "gaufres de pépé" maison, à la glace, à la mousse au chocolat ni goûter une pizza dégoulinante de fromages, ni manger de vol-au-vent, ni profiter du moindre plat gratiné. Je pensais à toutes ces choses qu'on ne pouvait pas lui faire découvrir et j'avais envie de pleurer. J'imaginais le nombre de repas qu'il allait passer à manger différemment des autres et je trouvais ça tellement injuste.
Et puis il y avait mon coeur de maman aussi... Je le voyais se gratter à longueur de journée, s'arracher la peau jusqu'au sang, se défigurer encore plus. Je voyais cet eczéma le bouffer littéralement et je sentais de la colère monter en moi. Pourquoi lui, si gentil, si mignon, si chouette... Pourquoi est-ce qu'il était obligé de vivre ça ? Ce n'était pas grave, non. Ce n'est pas grave. Il y a bien pire, oui. Mais quoi qu'il arrive à nos enfants de désagréable, on aimerait toujours que ça ne leur arrive pas. Que ça n'arrive pas, tout court.
Et puis le temps a passé... Les plaques se sont estompées, petit à petit, jusqu'à ce qu'on puisse sentir qu'il avait la peau aussi douce que tout le monde. Il a arrêté de passer le plus clair de son temps à se gratter. Je me suis mise aux fourneaux et j'ai découvert une foule de recette sans oeufs, sans lait, sans farine. Je l'ai vu frémir de bonheur devant mes cookies sans rien, mes crèpes sans rien, mes brownies sans rien. Je l'ai vu prendre du plaisir à boire tous les matins un biberon de chmilblik bizarre. Je l'ai vu comprendre et accepter qu'il ne mangeait pas pareil que les autres mais qu'il n'était privé de rien. Je l'ai vu manger bien plus sainement que beaucoup d'autres enfants, finalement.
Avec le temps on a apprivoisé ses allergies, on les a acceptées à notre tour et parfois même on arrive à se dire que ce n'est pas si triste que ça. Bien sûr on espère qu'il n'aura pas à vivre avec elles toute sa vie, mais on sait qu'il ne manque de rien, qu'il a tout ce dont il a besoin et même bien plus.
Ceci dit, croisez les doigts pour que Numérobis ne soit pas allergique ! Très égoïstement, je voudrais pouvoir l'allaiter sans me soumettre à la torture...
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